LA PASSERELLE DE MON ENFANCE N'EST PLUS LA
Dans la nuit du jeudi 18 au vendredi 19 octobre
2007 Ain Sefra est devenue, comme le 21 octobre 1904 et comme le 23
octobre 2000, la proie aux eaux de l’oued en furie. Tous les magasins
et maisons du centre ville sont envahis par les eaux et la boue. La
passerelle de la caserne est brisée ainsi que le pont qui relie
SIDIBOUDJEMAA au KSAR SIDIBOUTKHIL. Tous les cars, les taxis et les
camions en directions du nord comme ceux qui descendaient au sud sont
stationnés à Ain Sefra parce que toutes les routes sont saccagées. Je
ne sais pas si notre ami ALI AKIKA est à Ain Sefra parce que c’est le
moment idéal pour filmer. A la prière du vendredi les imams ont tous
demandé aux gens de donner à manger aux voyageurs qui sont dans la
cinquantaine ou plus de cars stationnés a Ain Sefra. La pluie n’a pas
arrêté de tomber pendant toute la nuit et la journée et s’est
poursuivie sur la deuxième nuit. Une fois de plus, la population d’Ain
Sefra a vécu en ce mois d’octobre 2007, les journées du 19,20 et 21 les
mêmes événements qui ont emporté le grand Seid Mahmoud le 21 octobre
1904, c’est à dire 103 années plus tard. Depuis l’indépendance, il y a
comme une répétition dans le débordement de l’oued sur le centre ville
d’Ain Sefra ,comme s’il nous prévient d’un future déluge, Ammi Cheikh,
l’ami de Bachir Hadj Ali ne disait-il pas « Après moi, le déluge » ?
1964, 1990, 2000 et maintenant 2007. Aucune population n’aurait
supporté d’y rester ou bien faut-il comprendre que les habitants du
centre ville qui y habitent toujours aiment beaucoup leur village.
Presque chaque fois, ce sont les mêmes causes et les mêmes effets, on
se demande des fois si ce n’est pas l’oued qui a fait déménager contre
leur gré ceux qui sont partis ailleurs en Algérie ou à l’étranger.
Depuis que l’homme, habitant d’Ain Sefra a commencé à occuper le lit de
l’oued, depuis qu’il a commencé à construire sur le lit de l’oued et à
avancer toujours et encore, nous ne cessons de payer cher cette
agression contre la nature.Un bon nageur, dit l’adage, c’est celui qui
respecte le cours de l’eau, le courant de l’oued en crues dont la force
a détruit cette année la passerelle et deux ponts dont l’un à plus de
10kms d’Ain Sefra qui est le nouveau pont de Tiout où il ne reste que
les rails suspendues. Depuis 1990, les responsables font semblant de
bricoler, des fois on déblaie, des fois on remblaie, des fois on casse
une falaise, mais on ne voit pas que l’oued veut autre chose, il veut
tout simplement passer sur son lit. Je me rappelle qu’en 1962, c’était
un grand plaisir de voir la pluie tomber et d’attendre l’arrivée de
l’oued en crues, maintenant un simple cumulonimbus de passage fait
trembler les habitants du centre ville. Le centre ville d’Ain Sefra a
été construit en 1880 selon les normes modernes de l’urbanisme et de
l’habitat. Les plans existent. Malgré son abandon depuis1962, il garde
son charme et ses allures modernes avec ses larges chaussées et
trottoirs et ses rues parallèles. »Peut-on revoir un jour la Ain Sefra
de 62 ? a demandé un habitant au SG de la wilaya qui lui a répondu « on
la rendra mieux que 1962 ». Est-ce une promesse pour dormir comme on
l’a toujours fait ou est-ce une détermination d’en finir avec ce
problème ? L’avenir nous le dira. Le problème n’est pas au-dessus de
nos forces, ce n’est pas une fatalité et ceux qui détiennent le pouvoir
de décision sont responsables de ce qui se passe. On dit qu’on ne peut
la faire passer au loup qu’une seul fois et pour nous c’est la
quatrième fois en 20 ans que les habitants du centre ville de Ain Sefra
passent la nuit sur les toits et sont envahis par la boue. Quand
commenceront-nous à rendre à cet oued son lit ? Faut-il s’avouer vaincu
et renoncer à la construction des ponts, ne plus construire ou n’en
construire qu’un seul ? Est-ce que la place du pont est mal choisie,
faut-il lui changer de place ? Parce que le pont d’Ain Sefra se trouve
juste sur la rencontre des deux oueds. Faut-il arrêter toute activité
quand l’oued est en crues, il y aurait moins de perte dans ce cas et
quelque soit la montée du prix du baril, elle n’aura servi à rien si
nos grands travaux sont à chaque fois balayés par une pluie de quelques
heures. Déjà, en 2000, les plus sinistrés des sinistrés ont fait la
prison parce qu’ils ont parlé avec nervosité et je profite pour
demander leur réhabilitation et l’effacement des fautes de leurs
casiers parce qu’ils avaient raison de s’énerver, si toute la
population avait fait pareil, on ne serai pas là dans cette re-belote
de la boue. Si les autorités veulent travailler et faire quelque chose
pour leur pays, voilà ce que nous proposons :
- Revoir le niveau de la chaussée.
- Le niveau des regards
- Le niveau des trottoirs
- Les habitations doivent élever le niveau de leur rez-de-chaussée de deux marches au moins
- Réfléchir au niveau du sol dans la rénovation du centre ville
- Transformer les îlots en bâtiments avec des logements au premier et deuxième étage et des magasins au rez-de-chaussée
- Pour la beauté, les terrasses en tuiles rouge
- Pour les murs des berges, c’est Monsieur l’expert qui n’est autre
que l’oued lui-même qui nous dicte qu’il faut voir le V de la victoire
formé par l’oued, un V avec des lignes bien droites, quand on regarde
Ain Sefra du ciel. Ce grand V doit relier les deux petits ponts de Sidi
Boudjema, le Mouillah et le Breidj au grand pont du centre ville Ain
Sefra. Pour réparer la faute qui était faite comme ça bêtement qui a
consiste à tout faire pour légitimer l’occupation du lit de l’oued par
l’Etat et la population avec l’établissement des titres de propriété
qui complique la réparation de l’erreur en donnant raison aux occupants
mais qui donne en même temps tort à tout notre système qui a méprisé la
noblesse et la valeur du principe de la propriété.
Ain Sefra veut revoir la beauté de son hivers, elle veut revivre
les moments de pluie au bord de la cheminée comme nous racontent les
vieux. Comme ça nous ne craindrons plus la pluie et l’oued, au
contraire. Sans compter que l’Etat et les particuliers ont tous
construit sur le lit de l’oued : le marché au légumes, les galeries,
les habitations, bureaux, hôtels là où il n’y avait jusqu’en 62 que des
parcs, le boulodrome et le souk c’est à dire des terrains vides où
l’eau de l’oued ne fait pas trop de dégât s’il arrive à déborder. Avant
62, on faisait périodiquement le débouchage des ponts et les autorités
étaient en état d’alerte à la moindre crue de l’oued pour faire sauter
les ponts et passerelle à coups de canon quand l’accumulation des
objets et arbres véhiculées par l’oued transforment le pont en barrage.
A cette occasion notre population a prouvé une énième fois qu’elle
mérite d’être sauvée et de ne pas être abandonnée parce que cette fois
la destruction des ponts a fait vivre ces trois jours à Ain Sefra
quelques trois à quatre milles voyageurs pris entre les ponts brisés.
Plus de trente cars pleins de voyageurs, des centaines de camions et
semi, des taxi, des voitures de particuliers ont été bloques à Ain
Sefra. Une fois que tout le monde était sûr que la route nationale
était fermée jusqu’à lundi ou mardi, c’est a dire à partir de vendredi,
les sinistrés de Ain Sefra se sont occupés des voyageurs comme si
c’étaient des invités d’honneur et personne n’a manque de quoi que ce
soit. Même les énerves étaient consolés avec des « estimez-vous heureux
« vous êtes chez vous » « ou encore votre situation est mieux que la
maladie ou la prison. Comme si les habitants de Ain Sefra se sont donne
le mot pour oublier leur propre problème jusqu’à ce que ces voyageurs
continuent leur chemin en sécurité ? Et Ain Sefra a grandit avec ses
évènements. Toutes les écoles coraniques et les FAJ ont ouvert leur
portes, les voisins y ont apportes des lits des matelas des couvertures
et chaque jour, à partir de 6 heures du matin jusqu’à 24h00 du soir des
bénévoles se sont mis à tour de rôle pour la distribution des cafés,
thés, gâteaux couscous aux voyageurs sans compter ceux nombreux qui ont
pris chez eux des connus ou inconnus parmi les voyageurs. Les cars
étaient sollicités dans toutes les directions pour aller manger. Un
habitant a pris à lui seul deux cars pendant toute une journée et il
n’était pas le seul à le faire. Il y avait toujours plus à manger que
les voyageurs. La nuit du samedi et dimanche des gens couraient le soir
dans tous les sens avec leur couscous garni et même sont allés jusqu’au
barrage de TIOUT traversant les centaines de semis stationnes sur la
RN6 et ils sont retournes avec leur couscous, les camionneurs leur ont
dit nous avons mange « ALLAH YEKHLEF ». Certains voyageurs sont devenus
amis avec les maisons à cote de leur car, ils ne se gênaient plus pour
demander café thé et chargement des portables. Un habitant a pris sans
le savoir une nièce à lui qui rentrait de Annaba à Bechar. C’est en
discutant que les femmes se sont reconnues. Une femme enceinte a mis au
monde une fille à l’hôpital d’Ain Sefra. Un cortège de mariage a passé
trois jours chez des connaissances à Ain Sefra, il ramenait la mariée
d’Oran à Beni Ounif. Il y a eu même des voyageurs en déménagement
abandonne par leur transporteur qui ont trouvé aide sympathie à Ain
Sefra. Le couscous et la SOLIDARITE de Ain Sefra, ce qui s’appelle
SOLIDARITE ont été à la une ces derniers jours et cette publicité a
touche toutes les régions d’Algérie Guelma, Khenchela, Chlef, Bejaia,
Setif, Annaba, Alger, Blida, Tiaret, Oran, Elbayadh, Djelfa, bref toute
l’Algérie et ceci sans feux de rampe, sans camera, sans photo, ni
télévision ni radio ni journaliste. Seulement DIEU et la conscience.
écrit par chami